JE CROIS QUE CHAQUE HISTOIRES DEVRAIENT COMMENCER PAR 'IL ÉTAIT UNE FOIS' ; MÊME SI AUCUNE D'ENTRES-ELLES N'EST UN CONTE, ON AURA AU MOINS TOUS L'ESPOIR D'ENTENDRE UN JOUR : 'ET ILS VÉCURENT HEUREUX ET EURENT BEAUCOUP D'ENFANT.' ▲ « - Tu m’entends Tommy. Tout vas bien se passer, d’accord… tout vas... bien se passer. » J’entends plus rien. Mon souffle une dernière fois se dépose dans l’air, des morceaux de verre dans ma chair. Tommy est sur l’autre siège, je lui tiens la main. Je ne veux pas le laisser, je ne veux pas le quitter. J’ai encore la lumière du camion dans le regard, le bruit de la voiture de ma mère partir, se retourner. Le bruit des vitres qui se brise et Tommy qui  regarde et qui n’a pas idée de ce qui arrive derrière. Je n’ai pas beaucoup de souvenir. J’ai des brides de mon enfances, des moments uniques avec mon petit-frère ou on jouait ensembles et maintenant, j’ai ce souvenir-là. J’ai dans ma tête, avec une précisions horrible, chaque seconde de cette nuit ou Tommy voulait m’accompagner à une soirée entre copine, parce qu’il ne voulait pas rester seul à la maison. C’est beau d’avoir des parents médecins, ils voient leurs enfants mourir sur le lit d’urgence, comme s’ils étaient tout aussi fautifs que moi. L’idée ne leurs aient même pas venu qu’ils auraient peut-être pu le sauvé, eux. Que ce n’était pas ma faute à moi, si le feu était rouge et que je suis resté là, à attendre qu’il passe au vert.

J’ai aussi une image dans l’ambulance. Je me réveille d’un coup et je vois Tommy sur le côté. Je veux attraper sa main, le prendre dans mes bras. Si c’était facile pour mes parents de commencer à m’ignorer après ça, je savais que lui ne m’aurait jamais dit : « Tu n’es pas notre fille, tu le sais. » Peu importe mon sang, j’étais celle qui allait le chercher après les cours, l’aider à faire ses devoirs, jouer au jeu vidéo avec et faisait la cuisine –monstrueuse – avec lui.  Je l’ai plus élevé que mes parents, enfin que Tom et Lila. Pour moi, c’était la chose la plus importante de ma vie.  Quand Tommy était là, ma vie était parfaite.

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Ils disent qu’ils essayent de me pardonner, mais que c’est trop dur. Aujourd’hui c’est l’enterrement de Tommy. Dans une robe noire, je regarde la tombe, sa peluche préféré entre les bras. J’essaye de ne pas pleurer, mais c’est dur. Les larmes partent, elles font la course sur ma joue et quand on me demande de dire quelque chose je pars en courant. Je suis faible. Je n’arrive pas à faire face à sa mort. Je n’arrive même plus à rentrer dans une voiture. Mes mains trembles devant la porte de sa chambre et devant tous ses souvenirs posés un peu partout dans la maison.  A table ce soir, Tom a balancé son assiette vers moi. Il voulait me blesser. Physiquement, mais Lila l’en a empêcher. Quand j’étais par terre, entendant le bruit de l’assiette contre le mur derrière moi, je n’ai pas pu m’empêcher de pleurer une seconde fois. L’un des camions de Tommy traînait là, sous la table. On aurait dit le camion du conducteur qui nous a foncés dedans. Le conducteur qui s’était endormi sur le volant. J’aurais tellement préféré qu’il soit soul. Que ça soit même un tueur en série, mais pas un maladroit père de famille qui essayait de faire des heures supplémentaire pour pouvoir payer une opération coûteuse à sa petite fille chérie.

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Ce ne sont plus mes amis. Je sus la petite conne qui a tué son petit frère, voilà comment on m’appelle. La petite conne. Avant, j’étais Eden. La fille Jenkins, la fille au premier rang, doué, adorable. Celle avec qui on voulait être parce qu’elle était parfaite. Maintenant, on m’envoie des tomates quand je marche dans la rue. On me dit que je devrais être en prison… Les gens sont cons, non ? Ils croient peut-être que j’étais l’homme dans le  camion, c’est ça ? Il y a tellement de rumeurs sur moi, tellement de choses horribles et dégoûtante qui sont fausses mais que tout le monde prend pour la vérité, pure et simple. Tom et Lila prennent plus de services, il passe leurs vies à l’hôpital, ils m’évitent. Ma vie ne se résume plus à rien. Elle est vide, sans bruit et je m’étouffe dans ce silence. Je fuis. Je prends mon sac, mes vêtements et la peluche de Tommy. Je veux partir et aller quelque part où on ne parlera pas de moi. Je veux recommencer. L’ambulancier qui m’a sauvé m’a dit que j’étais une miraculé. Que j’aurais dû mourir, comme Tommy, mais qu’il devait surement y avoir un raison pour que je sois vivante.  

Pour Tommy, je veux trouver cette raison, alors en vélo je pars de Dublin. Je n’ai pas assez d’argent pour me prendre un billet d’avion. Je n’irais donc pas très loin, mais j’irais. Je traverserais toute l’irlande s’il le faut. Je trouverais une ville, un lieu. Un endroit ou Eden ne sera pas Eden. Une fille, comme les autres. Et c’est tout.

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Je n’ose pas aller plus loin. Je suivais une route, je me disais qu’au pire des cas, je me cacherais dans un bateau. Un autre pays, c’est bien aussi ? Mais je suis fatigué, épuisée.  Je n'ai pas mangé depuis un moment, je ne dors pas assez et je pari tout ce que vous voulez qu'aucun flic ne me cherche. C'est là qu'il me trouve, le vieux Richard. Richard Snow, dit-il. J'avais peur que ça soit un vieux pervers, mais Richard est un vieux tout court. Il m'aide à me lever, m'offre à boire et me conduit chez lui. Il y a quelque chose d'extrêmement rassurant dans ses yeux.

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Ça fait deux semaines maintenant que Richard, le gardien du cimetière m’a trouvé dans la forêt. Je m’étais endormi, fatiguée, plus rien à manger et j’étais visiblement en train de mourir petit à petit sans m’en rendre compte. Je n'avais plus un sou sur moi, pas grand-chose. Il a décidé de m’offrir un toit et un peu d’argent si je l’aidé. Parce qu’il est vieux et qu’il a besoin d’aider pour gérer le cimetière – assez grand quand même - . Je m’y suis vite fait. A traîner entres les  tombes tous les soirs. A vérifier que personnes ne laissent des détritus dans le coin, à arranger et à faire du jardinage par ci par là. C’était dur au début, je ne travaille pas dans la vie. En réalité, je n’ai jamais travaillé de ma vie. Et puis Cahir me faisait peur, alors je restait dans  l'espèce de cabane-maison que Richard m’avait offert et quand je me balade dans la ville, j’ai l’impression qu’on me regarde, avec des gros yeux. Du coup, je ne sort pas souvent. Jusqu’à ce que Richard m’inscrive au lycée de la ville. Oui, il y a un lycée ici. « - Il faut que tu sortes, que tu profites de ta vie. Tu es encore si jeune Eden, tu ne vas pas travailler ici toute ta vie. N’est-ce pas ? » Comment dire non à ce papi de 70 ans qui n’avait plus de famille et qui travaillait au cimetière depuis toujours ? Mais quel galère quand même... j'ai un an de plus que les autres.